Le Gua  : La laiterie  1912 - 1985

 

 

Omer Baudry

 

Publié dans le Fil de la Seudre N° 335 novembre 2006

 

 

 

Entre 1873 et 1879, le phylloxéra a ravagé le vignoble français et notre contrée très viticole a été ruinée. Certains sont partis et des paysans de l'Aunis et de la Vendée sont venus cultiver les terres abandonnées. Ils sont arrivés avec leurs traditions de vaches laitières alors que les Saintongeais ne connaissaient pratiquement que les vaches de trait qui fournissaient à peine plus de lait que ce qui était nécessaire pour élever leur veau. Le reste servait à faire du beurre maison mais n'était pratiquement pas employé dans la cuisine; on préférait la graisse du goret et le vin! Les cochons avaient le petit lait.

 

À Chaillé, près de Surgères, un petit producteur de lait, Eugène Biraud, dynamique et entreprenant, las de voir son lait payé très bon marché par de petits industriels, a réussi à convaincre une trentaine de voisins de créer une coopérative laitière. Elle démarra sa production en 1888. Il en avait eu l'idée par les récits d'un voisin qui, pendant la guerre de 1870, avait vu fonctionner les « fruitières » (coopératives) en Franche-Comté. Le beurre des Charentes était né.

 

Dans notre petite contrée, on a essayé tant bien que mal de surmonter la crise phylloxérique par le greffage sur des plants américains et la plantation d'hybrides, mais la venue de Vendéens et d'Aunissois a amené  une diversification des cultures et une production laitière.

 

 Quelques notables, Jean Mercier de Cadeuil, Me Moreau notaire au Gua et M. Martin chassé d'Aunis par le phylloxéra, installé à La Tublerie à Sablonceaux à la limite du Gua et quelques autres ont convaincu des producteurs de s'associer pour créer la coopérative du Gua en 1912.

 

 La qualité du beurre des Charentes a été vite reconnue par rapport à celle des productions traditionnelles qui associaient beurre et fromage. En faisant le fromage, ils recueillaient la crème qui restait dans le sérum pour en faire du beurre tandis qu'en ne faisant que du beurre, on n'introduisait pas ce goût qui provenait de la fermentation des fromages.

 

L'obligation d'élever des Normandes, au lait très riche en crème, a également contribué à la qualité. Quand le lait a été acheté aux producteurs à un prix proportionnel au taux de matière grasse cette clause est devenue moins importante.

 

La coopérative du Gua recueillait le lait des communes environnantes et beaucoup de vaches étaient mises dans les marais quand elles étaient taries, ne revenant dans les fermes qu'au moment des vêlages. Ce fut une qualité supplémentaire avec l'appellation « prés salés de la Seudre ». La laiterie s'est considérablement développée jusque dans les années 1960 produisant 600 t de beurre par an et s'est diversifiée en 1955 en introduisant une unité de production de lait en poudre.

 

Avec la surproduction de lait, les quotas et la diminution du cheptel, dans un premier temps, elle a absorbé toutes les laiteries environnantes mais a fini par être elle-même absorbée par Surgères en 1982 et a arrêté sa production en 1985.

 

Actuellement, il ne reste que trois lieux de production en Charente-Maritime:  

 

Ø                 Surgères (beurre et dérivés)

 

Ø                 Tonnay-Boutonne (pâtes demi-cuites)

 

Ø                 Chadenac (fromages).

 

 

Merci à Jean Couret pour les précieux renseignements et à Loïc Raud pour les photos de la laiterie coopérative.